Les khmers rouges et l’un de ses chefs Pol Pot ont laissé un Cambodge en ruine, en sang et en larme. Lorsque je visite un pays j’aime énormément connaître son histoire. Il faut en effet comprendre le passé pour savoir pourquoi les cubains vivent comme ceci. Il faut donc connaître l’histoire des Khmers rouges pour comprendre le Cambodge actuel. Rarement un peuple a connu un tel enfer surtout quand le diable en personne décide de tuer son propre peuple. Ou comment le Cambodge s’est enfoncé dans les années 70-80 dans l’une des pires pages de l’humanité. S-21 et Killing Fields seront pour vous, touristes, deux lieux à ne pas manquer, triste à en pleurer et pourtant il ne faut pas oublier. Jamais !
L’histoire du Cambodge depuis son indépendance
Lorsque la France perd la bataille de Dien Bien Phu au Vietnam, les cambodgiens sont loin de penser que leurs vies sont aussi en train de basculer. Car la défaite de la France au Vietnam signe la fin de la présence française en Asie du Sud-Est. Fin de l’Indochine, fin des colonies fin du protectorat, les colons français repartent vers Paris en laissant trois pays (Vietnam, Laos et Cambodge) dans le doute sans de véritables institutions. Pour ces trois pays tout est à construire.
Les populations locales n’ont pas le temps de fêter leur indépendance qu’une autre guerre bien plus sombre se profile. Il s’agit de la guerre du Vietnam, qui oppose les USA, pays capitaliste, au Vietnam, pays Communiste. Et dans ce petit jeu de massacre le Cambodge va payer le prix fort. En effet, on a tendance à croire que le conflit opposant les USA au Vietnam n’oppose que ces deux pays. Pourtant le Cambodge, pays neutre, va recevoir un nombre de bombe hallucinant sur son territoire. Certains analystes estiment même que le Cambodge a reçu une quantité de bombe supérieure à la guerre opposant le Japon aux USA durant la 2eme guerre mondiale !
Mais pourquoi bombarder le Cambodge ? Les américains en pleine guerre du Vietnam luttaient contre la guérilla communiste dans le sud du Vietnam. Ces communistes vietnamiens que l’on appelait Viêt-Cong tentaient de renverser le pouvoir pro-américain au sud du pays et de réunifier les deux Vietnam sous le drapeau communiste. Or pour recevoir des munitions et des hommes les Viêt-Cong étaient ravitaillés depuis le nord du Vietnam par une piste qui était appelée « la piste Ho Chi Minh » (le nom du père de l’indépendance du Vietnam). Or, pas de chance pour les cambodgiens, cette piste passait par le Cambodge. Au départ les américains ont donc bombardé l’est du Cambodge frontalier avec le Vietnam pour arrêter le ravitaillement espérant casser la voie de communication entre le Vietnam du Nord et du Sud. Mais au fur et à mesure de l’avancée de la guerre, les bombardements ont touché l’ensemble du Cambodge, surtout les zones rurales. En trois ans les cambodgiens ont donc connu la peur des bombes US.
En mars 1970, le roi Norodom Sihanouk est renversé par un coup d’état militaire. Les américains trouvent un allié avec Lon Nol, l’un des deux organisateurs du coup d’état. Il s’en suit une guerre civile entre les forces de Lon Nol, soutenue par les USA contre la guérilla des Khmers rouges. Et c’est là que le poids de l’histoire se ressent. Déçu d’une situation toujours préoccupante sous Lon Nol d’un point de vue économique, les cambodgiens ont en mémoire les centaines de bombes qu’ils ont reçu sur la tête par les américains. Les Khmers rouges communistes vont donc voir le nombre de leurs partisans exploser, surtout dans les régions rurales du Cambodge. Les régions gagnées par les Khmers rouges étaient ainsi appelées les « régions libérées ». Tandis que la guerre civile avait déjà fait plus de 500 000 morts, les américains reculaient alors que les Khmers rouges avançaient sur la capitale Phnom Penh. Et le 17 avril 1975, sous la liesse générale des gagnants Khmers rouges, les américains décidèrent de quitter définitivement le Cambodge, vaincus. Accueillis comme des libérateurs, le piège des Khmers rouges sur le Cambodge ne fera que commencer.
Les Khmers rouges au pouvoir
L’idéologie des Khmers rouges
En avril 1975 jusqu’à janvier 1979 le nouveau nom du Cambodge donné par les Khmers rouges est le Kampuchea Democratique. Le nouveau chef d’État est Khieu Samphan tandis que le partie est dirigé à partir de 1977 par un certain Saloth Sar plus connu sous le nom de Pol Pot.
Les Khmers rouges dont les différents noms furent le Partie Communiste du Cambodge et le Partie du Kampuchea Democratique sont une organisation d’idéologie de base communiste avec une influence clairement maoïste qui avait pour projet de constituer une société agraire sans classe. Cette phrase est très importante car pour les Khmers rouges les gens doivent travailler la terre et n’ont rien à faire dans des villes.
Pour les Khmers rouges il y avait le « peuple ancien », qui représente les paysans, les vrais khmers rouges. Et à contrario le « peuple nouveau » les exilés des villes qu’il fallait rééduquer en les faisant travailler comme des esclaves dans les champs et séparer de tout bien et de leurs familles. Mais à la fin du régime des Khmers rouges même le peuple ancien fut touché par la barbarie de Pol Pot puis la purge à commencer à toucher les Khmers rouges. Pol Pot n’avait confiance en personne et tuer ses propres soldats fut un jeu d’enfant. En parlant d’enfant ceux-ci ont été enrôlés dans des écoles pour apprendre à manier les armes, à connaître l’idéologie des Khmers rouges et enfin pour dénoncer. Oui dénoncer tout ce qu’ils trouvaient anormal, suspect. Des gosses de 12 ans avaient la décision de vie ou de mort sur des groupes de centaines de personnes.
Premières décisions des Khmers rouges
L’une des premières décisions des Khmers rouges et de leur parti politique, le Kampuchéa Démocratique, fut une décision bien…surprenante ! En effet la décision fut prise d’évacuer totalement la population du Phnom Penh en l’espace de trois jours ! La population obéit sans broncher aux Khmer rouges. Il faut dire que ces derniers avaient trouvé une bonne excuse : Les américains pouvaient bombarder à tout moment la capitale il fallait donc protéger la population locale. Sauf que les américains étaient déjà partis et très loin. Phnom Penh fut donc une ville morte. Imaginez un peu, une ville comme Lyon déserte ! Plus aucun habitant ! Phnom Penh évacué, le génocide des Khmers rouges peut commencer.
Car le départ de Phnom Penh par les habitants fut un premier choc. Des familles entières furent séparées pour beaucoup, à jamais. Il suffisait qu’un des membres de la famille ne soit pas dans la maison au début de l’évacuation pour que celui-ci soit interdit de retrouver ses proches. Les premiers massacres ont commencé à Phnom Penh notamment pour ceux qui refusaient de quitter leurs maisons. Mais pourquoi évacuer les centaines de millier de personnes de Phnom Penh ?
Ce qui se passe à Phnom Penh va se passer dans toutes les villes du Cambodge sans exception. Toutes les villes du Cambodge vont devenir des villes fantômes où les soldats Khmers rouges vont forcer les habitants à les quitter. Or, en pleine saison sèche, la population a du marcher de longs kilomètres sous un soleil de plomb, sans eau et sans nourriture. Ainsi des milliers de personnes moururent pendant cet exode forcé.
Apres l’exode, les Khmers rouges vont commencer à emprisonner, puis à tuer sous la torture, toute personne supposée ou accusée d’être pro-américaine. Ainsi, attention la liste est longue, et surtout très surprenante : les intellectuels, les professeurs, les médecins les employés de l’ancien gouvernement furent les premières victimes du génocide de Pol Pot. Parler une langue étrangère, porter des lunettes, mais aussi avoir une couleur de peau plutôt blanche (plus citadin que paysan à travailler au soleil) se soldait très souvent par votre mort prochaine.
C’est ainsi que durant 4 ans une chape de plomb envahit tout le Cambodge. Où chaque personne n’avait qu’une seule pensée : survivre. Les campagnes deviendront des camps de travail à ciel ouvert. Des champs de la mort où des millions de Cambodgien mourront. Mourir de fatigue, d’épuisement.
L’intervention Vietnamienne et la fin du régime des Khmers rouges
Alors que la communauté internationale est dans l’expectative complète, certains cambodgiens ont réussi à quitter le pays et témoignent des atrocités. Beaucoup pensent qu’il s’agit de témoignages pro américain et ils ne sont que moyennement écoutés. Ambassades, journalistes, politiques, personne ne sait véritablement ce qui se passe au Cambodge mais tout le monde se pose la question.
Pourtant un pays plus que tous les autres a tendance à croire aux témoignages des réfugiés cambodgiens. Il s’agit de l’ennemi héréditaire du Cambodge ; Le Vietnam. Et pour cause, les Khmers rouges vont faire une erreur stratégique. Pol Pot veut récupérer d’anciens territoires cambodgiens qui font partie du Vietnam. Il demande donc à son armée de faire de multiples incursions au Vietnam. Et ces différentes incursions non rien de bien amicale car des populations locales sont exécutées. Après de multiples incursions, le Vietnam décide de réagir et d’envahir le Cambodge en décembre 1978. Un mois après, Phnom Penh fut libéré mettant, un terme au régime de Pol Pot et à l’un des pires génocides de l’Histoire de l’Humanit. Les chiffres divergent mais entre 2 et 2,5 millions de Cambodgiens ont perdu la vie pendant que Pol Pot était au pouvoir. Soit près de 33% de la population cambodgienne ! Mais si vous pensiez que la Communauté Internationale a applaudit des deux mains l’intervention vietnamienne, vous faite une grave erreur. Nous sommes en pleine guerre froide et les occidentaux vont se ranger du coté de…Pol Pot ! Le cauchemar continue.
Les khmers rouges et Pol Pot en exile. Un « J’accuse s’impose »
Les Khmers rouges prennent une véritable fessée par l’armée vietnamienne mais aussi par des communistes cambodgiens qui ne supportent pas Pol Pot et son idéologie maoïste. Les Khmers rouges et Pol Pot s’exilent non loin de la frontière de la Thaïlande en pleine jungle. A l’ONU commence une bagarre diplomatique. Les USA soutiennent les anciens membres du régime des Khmers rouges contre les nouveaux occupants communistes Vietnamiens alliés de l’URSS. Un veto est même déposé à l’ONU par les USA et la Chine pour qu’une intervention des Nations-Unis accélère le changement de régime au Cambodge. A l’époque, Il faut s’avoir qu’il y a un réel divorce entre les communistes chinois et russes. Les deux pays communistes n’ont plus la même idéologie. Et la Chine se rapproche de plus en plus des USA. Vous comprenez un pays dans un genre de Game of Trônes le jeu des alliances. USA, Chine, Thaïlande et Grande Bretagne ensembles d’un coté, contre le Vietnam et la Russie de l’autre. Fait important, pour punir l’invasion du Cambodge par les Vietnamiens les Chinois vont même envahir le nord du Vietnam en représailles. L’invasion ne va pas durer longtemps, les chinois vont se prendre une fessée. Décidément les Vietnamiens sont plutôt chaud pendant les guerres victoire contre la France, les USA, le Cambodge et la Chine !
Si l’on peut applaudir des deux mains les différents procès qui ont condamné les dirigeants Khmers Rouges, force est de constater qu’il manque quelques accusés sur le banc des assassins. Et quand je parle de prévenus je parle de certains dirigeants occidentaux qui ont laissé faire un génocide et qui n’ont rien fait ou au pire ont tout fait pour que rien ne cesse. Pour commencer mon « J’accuse » le régime de Pol Pot n’aurait vraisemblablement jamais pris le pouvoir si le président Nixon président des USA n’avait décidé de bombarder un pays neutre comme le Cambodge durant la guerre du Vietnam. Imaginez le Cambodge, pays qui n’a rien demandé et qui a pris plus de bombe qu’entre la guerre du Japon et des USA durant la 2eme guerre mondiale ! Qui plus est, les USA ainsi que la Thaïlande, la Chine et la Grande Bretagne ont imposé un embargo sur le Cambodge car leur libérateur était…le Vietnam. C’est ainsi qu’en Thaïlande les Khmers rouges de Pol Pot ont été carrément entrainés par les services secrets britanniques en vue de reprendre le pouvoir ! Le mec il est responsable de plus de 2 millions de Cambodgiens et la Grande Bretagne écoute comme un toutou l’Oncle Sam qui n’est pas content mais alors pas content du tout de voir les Vietnamiens au Cambodge! On croit cauchemarder les yeux ouverts !!!!
S21 et Choeung Memorial Stupa en mémoire des victimes
Du coté de Phnom Penh deux lieux symbolisent la cruauté des Khmers Rouges. Il s’agit de la prison S-21 dans le centre de la capitale du Cambodge et de Choeung Memorial Stupa. Je suis allé visiter les deux lieux pour me recueillir pour d’une certaine façon comprendre l’horreur.
Le bureau de sécurité S21
C’est dans un ancien lycée que les Khmers rouges ont construit leur « bureau de la sécurité ». Dans ce centre qui sera très vite un centre de détention, près de 17 000 prisonniers ont été torturés, interrogés et tués entre 1975 et 1979. Seul 7 prisonniers ont réussi à survivre à cet enfer. Si S-21 est la prison la plus connue il est à noter qu’il y avait plus de 190 prisons sur l’ensemble du territoire cambodgien. Le régime de Pol Pot avait quadrillé l’ensemble du territoire pour être au plus proche des prochaines victimes. Dans le centre S-21, les personnes incarcérées étaient aussi bien des jeunes que des vieux. Mais aussi des femmes, des enfants, des bébés sans oublier les intellectuels, diplomates et étrangers que Pol Pot redoutait temps. Les tortionnaires divisaient le travail en trois phases. Lorsque les prisonniers n’avouaient rien au groupe des « Gentils » qui était un groupe politique, les prisonniers passaient devant les tortionnaires « chauds » puis « mordants ». De toute façon qu’elle qu’était le groupe ils étaient exécutés.
Choeung Ek ou Killing Fields: L’horreur absolu
Ce sont des touristes qui m’ont conseillé de venir du coté de Choeung Ek. Le nom donné à ce lieu par les touristes est d’ailleurs un tout autre nom : Killing Field. Cet endroit est le principal lieu d’exécution de prisonniers du Kampuchea Democratique. Il se trouve à 18 km au sud-ouest de Phnom Penh. Avant de devenir ce triste lieu où se trouve des dizaines de charniers sur 2 hectares, Choeung Ek était un cimetière chinois. C’est un villageois qui a découvert ce lieu en 1979 après être renté d’exile. Il a découvert un arbre avec des cheveux et des matières cérébrales sur son tronc et quelques mètres plus loin il retrouva plusieurs corps. Avec les différentes fouilles plus de 17 000 victimes ont été estimées ici. Un stupa au centre a été construit où sont exposés les ossements et cranes des victimes.
Je suis resté plus de 2 heures à Killing Fields. C’est un endroit où l’émotion est décuplée. A l’entrée du site, les employés vous donnent un autoguide. Et vous écoutez l’horreur, il y a de nombreux témoignages des victimes mais aussi de certains bourreaux qui expliquent comment ils se sont retrouvés là. Ce qui surprend le visiteur de Choeung Ek sont les ossements et les vêtements à même la terre. En fait chaque année la mousson fait remonter des ossements et des vêtements des victimes. Et donc en parcourant le site vous êtes amenés à tomber sur de nombreux ossements par terre et des vêtements. Lorsque les ossements et les vêtements sont pleinement sortis, les responsables du site les mettent dans des boites en plastique pour les protéger. Or, à mon passage je fus surpris des nombreux ossements qui continuaient à sortir de terre ! C’est poignant, j’avoue que j’ai pleuré à plusieurs reprises et pour une fois je ne fus pas le seul ! Mais je n’ai aucun regret, j’ai vraiment appris beaucoup de choses sur le régime de Pol Pot, la douleur qu’ont du subir les victimes, comment ils étaient torturés.
Conseils pour visiter S-21 et Killing Fields à Phnom Penh
- Vous pouvez visiter S-21 de n’importe quel hôtel du centre de Phnom Penh. Il faudra marcher une bonne demi heure. Mais la marche est sympa surtout que vous allez passer devant quelques ambassades dont les façades sont bien sympathiques !
- Au S-21 vous pouvez acheter un petit livret avant la visite. Je vous le déconseille si vous êtes un peu à court d’argent. Il n’y a aucune information dans le livret et le peu de texte écrit vous le retrouvez dans les différentes salles du centre. Je me demande encore pourquoi ils ont fait un tel livret.
- Pour la visite de Killing Fields privilégiez une visite le matin car avec le soleil il peut faire rudement chaud les après-midis.
- Ne partez pas seul en marchant ou en louant un scooter. Le lieu est vraiment très très difficile à trouver. La meilleur idée est de négocier les prix avec le chauffeur de taxi et s’il ne veut pas, allez-y à plusieurs pour diviser les prix.
- Le prix d’entrée pour Killing Fields est de 6 dollars donc ayez de l’argent sur vous !
- Une fois n’est pas coutume je vais vous parler d’un film. En 1984 est sorti le film « la Déchirure » de Roland Joffe montrant les atrocités commises dans les camps tels que Killings Fields.
Si vous avez aimé cet article, merci de cliquer sur ‘j’aime’ en dessous, de le partager ou d’écrire un petit commentaire. Cela ne prend que quelques secondes mais cela me fait très plaisir.
Yohann Taillandier